Le film, dont le festival de Berlin accueille la première européenne, est sorti aux Etats-Unis en décembre, juste à temps pour concourir aux Oscars, auxquels il est nommé dans pas moins de dix catégories, dont celles de meilleur film, meilleure réalisation et meilleur acteur pour Jeff Bridges. Ce dernier reprend le rôle qui avait valu à John Wayne le seul Oscar de sa carrière, en 1970, dans la première adaptation du roman de Charles Portis pour le grand écran, "Cent dollars pour un shérif", signé par l'un des maîtres de l'âge d'or du western hollywoodien, Henry Hathaway. La version de Joel et Ethan Coen, beaucoup plus fidèle à l'âpreté et à la violence du roman, commence par une voix off qui résume l'histoire à venir.
En savoir plus Lesen Sie zu diesem Thema auch den Bericht auf unserer deutschsprachigen Seite.«Les gens n'arrivent pas à croire qu'une jeune fille de 14 ans puisse quitter sa maison et prendre la route, en plein hiver, pour venger le sang de son père. Mais ce n'était pas si étrange, en ce temps-là -- même si je dois reconnaître que cela n'arrivait pas tous les jours...». La voix est celle de Mattie, une femme "qui en a" -- comme l'affirme le titre original en anglais -- et qui va raconter, deux heures durant, comment elle avait embauché Rooster, un marshal acariâtre (Jeff Bridges) pour liquider Tom Chaney (Josh Brolin), l'assassin de son père. En chemin, le marshal et l'adolescente -- brillamment interprétée par Hailee Steinfeld, la révélation du film, nommée à l'Oscar du meilleur second rôle féminin -- vont croiser la route de LaBoeuf (Matt Damon), un ranger texan quelque peu imbu de sa personne, lancé lui aussi aux trousses de Chaney. Quand Henry Hathaway, dans la grande tradition du western hollywoodien classique, faisait évoluer ses personnages dans un Ouest américain verdoyant dopé au technicolor, les frères Coen optent pour un film plus âpre et plus sombre, dépeignant un ouest poussiéreux, inhospitalier et violent.
Subjuguant
L'humour, comme toujours avec les deux cinéastes, n'est cependant jamais très loin et le langage ampoulé utilisé par certains personnages -- notamment Mattie et LaBoeuf -- contribue à installer le film, volontiers bavard, dans une étrangeté parfois comique, malgré son fond foncièrement tragique. Et malgré ses longueurs, "True grit" offre plusieurs scènes d'une force visuelle subjuguante, telle cette chevauchée nocturne finale, qui révèle, in extremis, la tendresse de Rooster pour sa jeune protégée. Après l'échec sans appel de "A serious man", Joel et Ethan Coen ont signé avec "True Grit" leur oeuvre la plus profitable à ce jour.
Premier film des deux frères à avoir franchi la barre des 100 millions de dollars en Amérique du Nord, "True grit" a déjà rapporté plus de 160 millions de dollars de recettes, alors que sa carrière n'a pas encore commencé en Europe, où les Coen jouissent d'un public enthousiaste et fidèle. Les deux cinéastes avaient remporté leur premier Oscar en 1997 pour le scénario de "Fargo", avant de connaître la consécration du gotha hollywoodien en 2008 avec les quatre Oscars de "No country for old men - Non, ce pays n'est pas pour le vieil homme". Le duo était reparti avec les statuettes de meilleur film, meilleur réalisation et meilleur scénario, tandis que l'Espagnol Javier Bardem avait remporté l'Oscar du meilleur second rôle.
(L'essentiel Online/AFP)
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